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Archive du mois : juillet 2011

Mariage et Envie d’Enterrement

C’est l’été, les gens se marient, et nous, bah, on les regarde se marier.
Vous n’avez pas envie d’y aller à tous ces mariages, mais vos parents se chargent de vous rappeler que si vous n’allez nulle part, personne ne viendra à votre fête à vous dans quelques années. Et ça vous imaginez pas.
Y a d’abord eu le mariage de la fille de votre plombier.
Vous ne  la connaissez pas, mais vos parents tiennent à garder d’excellentes relations avec le monsieur qui vient déboucher votre lavabo trois fois par an, alors ça ne se discute pas.
La fille du plombier se marie dans une contrée lointaine et inconnue, Sidi Moussa. Vous y arrivez avec vos talons argentés, et vous découvrez ce que toute jeune fille appréhende : la non-mixité des festivités.
Pas même un cousin qui traîne dans la salle avec sa caméra, que des nénettes. Vous auriez su, vous auriez zappé la partie je m’achète un wonderbra. C’est pas ce soir que le célibat finira.
Votre mère aussi est déçue, mais ça ne se voit pas, son visage s’orne automatiquement d’un sourire quand elle entre dans la salle. Vous ne récupérerez votre maman que de longues heures plus tard.
La fille du plombier veut vous faire plaisir, alors vous êtes placées à la table d’honneur (avec la femme de l’électricien), juste en dessous de la clim.
La clim crache des icebergs, vous allez mourir d’une pneumonie, vous pleurez pour de vrai.
Le sourire de la mère se fige un peu et ses pieds vous tapent sous la table. Paraît que ça se fait trop pas de chialer à un mariage. Sauf à faire passer ça pour de l’émotion.
Mais vous n’avez jamais été une bonne actrice.
La mariée porte une perruque blonde et un masque sur le visage. Vous vous prenez en photo avec elle, vous pourrez faire croire à vos amis que vous étiez à Londres et que c’est Barbie chez Madame Tussaud.
La semaine d’après il y a eu le mariage de la fille de l’ex-directeur du protocole de telle administration.
Vous ne la connaissez pas, mais vous étiez dans la même école primaire. Alors pour vos parents, c’est quasiment votre meilleure amie et ça ne se discute toujours pas.
Comme toutes ses copines, ses parents ont choisi la salle d’un  grand hôtel, comme ça tout le monde a les mêmes photos de mariage.
Au lieu de vous préparer, vous devenez la domestique de votre mère. C’est le drame quand elle ne retrouve pas le foulard assorti à sa pochette et la maison se transforme en tsunami.
Personne n’est prêt mais votre père attend déjà dans la voiture.
Vous arrivez à salle du Sheraton (ou Hilton/St Georges/Aurassi), et chez les gens huppés, hommes et femmes se mélangent. Si vous y regardez de plus près, ils se mélangent trop, mais cela fera l’objet des commérages du petit-déjeuner post-mariage.
Vous remarquez que toutes les femmes d’un certain âge portent la même écharpe que votre mère autour des épaules. Vous vous retournez pour en rire avec elle, mais son visage s’est déjà figé du sourire automatique.
Les filles de votre âge sont toutes coiffées comme vous, le brushing ondulé. Sauf que sur vous, ça se voit pas. Mais c’est le geste qui compte.
La mariée est radieuse, elle sourit, elle danse, elle pétille, et ça vous émeut. Vous êtes bien la seule. Les commérages ont déjà commencé « Bouh elle danse trop, ça se fait pas pour une mariée » ; «  Tu as vu, elle n’arrête pas de rire et de parler, c’est pas bien » ; « Une mariée doit être plus réservée, elle est folle hadi » ; « Tu as vu comme le mari il est moche ».
A la fin, tout le monde repart avec sa petite boîte de gâteaux, et en les mangeant, les mêmes bonnes femmes feront tourner leur mauvaise langue sur le manque de raffinement du makroud.
Les langues de vipères, mascottes de tous vos mariages, iront après se coucher, le ventre lourd. Le lendemain, il y a encore un autre mariage à aller commenter.
C’est l’été, les gens se marient, et nous, bah, on sait ce qui nous attend !
Mamzelle Namous

La journée de la jupe

La vie est belle, il fait beau, on met des jupes qui volent au vent, les garçons matent les cuissots. Tout le monde est content.
Et y a des jours où y a tellement de vent, les jours où t’as décidé qu’un peu de marche te ferait du bien, où t’as pas réfléchi à l’incompatibilité équationnelle jupe courte + vent = strip tease offert aux riverains de said Hamdine.

Parce qu’ils le méritent bien avec tous ces travaux sur l’autoroute. Ils méritaient bien que tu leur livres à 9 h du matin l’un des secrets les mieux gardés de la terre : les filles, mêmes grandes, ça met des culottes pour enfants de moins de six ans.

Y a un garçon qu’est venu te dire que t’étais ravissante (un adjectif très prisé du dragueur de rue hein ![1]), et quand tu lui fais ta grimace qu’on dirait que t’as 5 ans, il t’a reproché de pas lui dire merci.

Ils en méritent quand même pas autant les gens de Said Hamdine, y a des limites à la générosité  intercommunale.

Puis tu arrives à ton travail, et là l’humanité se divise en deux catégories :

-Les gens bronzés

-Les gens blancs.

Les blancs sont les massakins, qui pour une raison ou une autre (pas le temps, pas l’argent, pas la carte, pas la voiture, pas la sociabilité)  ne vont pas à la plage.
Et comme leur blancheur leur donne un goût amer, lorsqu’ils voient une jeune fille dorée par le soleil, ils n’hésitent pas à sortir de leur bouche aigre-pas-douce, des énormités du genre« Bouh hada ça se voit c’est pas un bronzage de plage. Bayna t’étais à la piscine ou dans le jardin ta3 darkoum ».

Et la fille ne comprend rien à sa vie parmi ces gens.
(C’est pas à moi qu’on a dit ça. Je fais partie des blancs. J’ai essayé de bronzer dans le jardin, mais entre les arbres, ma mère qui insistait pour que je mettre de la protection solaire SPF 300 comme si j’avais 4 ans, l’ouvrier de la maison en construction d’en face [2] qui matait, j’ai pas trop pu).

La matinée au bureau consiste à observer la vie passer. Et une vie, ça passe doucement jusqu’à midi.

La pause de midi est l’occasion d’aller dans l’une des rues les plus chics de Hydra, manger un mini-cheeseburger à 160 dinars et prétendre que ça te suffit. Mais tu prends aussi des frites. Et à la caisse tu les déclares pas, parce que t’es une bad girl de la frite.
Tu sors, la peur au ventre que le caissier te chope et t’humilie, tu marches un peu et t’entends un homme derrière t’appeler « mademoiselle mademoiselle », des images du cachot d’El Harrach  défilent dans ta tête. Tu maudis ta radinerie.

Le mec te rattrape :
– Bonjour Mademoiselle, je ne veux pas vous déranger. Je suis un habitant du quartier, et vraiment je suis très très intéressée par vous………. Pourquoi vous rigolez ? Enfin vous rigolez c’est bon signe…… Non arrêtez de rire, je vais me vexer…… Je vous plais pas ?

Plusieurs leçons  à tirer :
Quand on habite à Hydra, on le dit, même quand c’est pas la peine.
Un homme qui dit très très sérieusement qu’il est très très intéressé par votre personne, alors qu’il vous a aperçu à la sortie d’un fast food, qui s’étonne que vous explosiez de rire comme une gosse de 6 ans ,  ça vous donne la frite.

Il méritait bien un « merci » ce mec là, mais je suis une radine, il l’aura pas.


Mamzelle Namous




[1] Après le célébrissime «  Vous êtes chormonte ». Quelques qualificatifs plus tard, et si silence de ta part, on arrive à des mots interdits aux mineurs de moins de 21 ans.

[2] Maison en construction, phénomène très répandu près de chez vous.

La la la la la la la la

Non, je ne suis pas en vacances sur une île paradisiaque sans électricité.
Je chauffe dans un monde où la clim a marché toute l’année, et a décidé de s’arrêter le jour où il fait 42 degrés.
Celle de la voiture, et  le mécano est en congé.
Celle du bureau, le service maintenance n’existe pas.
Celle de chez moi, elle crache des lézards ( ce sont des choses qui arrivent).
Si jeune vie algéroise était en mode pause ces dix derniers jours, c’est parce que chaque brouillon écrit finissait  irrémédiablement par parler de transpiration. Et bon on est pas dans une pub Rexona.
Alors par respect pour le lecteur, je me suis abstenue.
Y a des jours où j’avais aussi commencé à écrire sur les looks estivaux de mes collègues masculins.
J’ai envie de leur dire que c’est pas parce que c’est l’été qu’on doit en voir autant de leur morphologie. Les champignons des ongles d’orteils, les ongles d’orteils tout court, les poils sous les bras, les tétons parfois, les effets de la chaleur sous un corps qui n’a pas eu de rendez vous avec le savon depuis trois jours, ce ne sont pas des choses qui se partagent.
Autant de choses que vous m’en voudriez de partager avec vous.
J’ai eu envie de parler de la plage, mais j’y suis pas allée. J’ai voulu, j’ai essayé, mon gps m’a conduit au Club des Pins.
Sans carte d’accès,  face au gendarme, j’étais telle une kurde refoulée à la frontière. Je me suis défendue en expliquant que j’allais rendre une visite à mes amis ministres (ça arrive d’en avoir, même quand on a une clim qui crache des lézards). Et le gendarme m’a dit  » Fais l’appel à un ami alors ».
D’accord Jean-Pierre!
Une fois à l’intérieur, vous vous posez toujours la même question: comment peut il y avoir autant de ploucs avec de telles restrictions à l’entrée du territoire?
Un peu la question qu’on se pose quand on va en France.
Alors Club des Pins c’est pas une plage, juste des égouts et un peu d’eau,  des jet-ski qui ont besoin d’avoir pied pour prendre leur pied , des ballons de volley dans la gueule, des filles en bikini Burberry qui longent la côte dans l’espoir de trouver un type assez con pour ne pas reconnaître le faux et assez riche pour leur offrir du vrai Burberry.  Et y a aussi des gars qui portent des t-shirts dont la marque est Calvin Klein devant et Gucci derrière.
Le monde de la mode ne le sait pas, mais ces deux marques font des créations communes.
Quand on pense aux magnifiques plages que compte l’Algérie, on se dit que Club des Pins  est vraiment un monde à part. Donc ça compte pas comme aller à la plage.
Mes brouillons étaient aussi envahis des discussions typiques du quotidien :
 » Alors kech congé? « ,
« Non, t’as vu smata avec ramdane, ça gâche les vacances » ,
 » Skhana bezaf  ( fait trop chaud), ça me donne de l’anémie »,
 « Ah oui? »,
 » Oui c’est à cause de la fatigue ».
« Ah…oui…. »,
  » Tu as commencé à préparer ramdane? »
« Me préparer à quoi? A puer de la gueule? Oui j’ai mon stock de colgate bain de bouche ».
  » Ha ha ha, non acheter la vaisselle, faire la grand ménage ».
 » Ben j’ai balayé la cuisine hier, ça compte? »
Voilà ce que je vous ai épargné, ce mois de Juillet qui ressemble à un brouillon mal accordé. Mais, je sais pas pourquoi, j’ai toujours des notes de Claude François en fond sonore dans ma tête  » IL fait beau, il fait bon, la vie coule comme une chanson,aussitôt qu’une fille est aimée d’un garçon. Il fait rouge, il fait bleu, il fait du soleil au fond des yeux, quand on vit dans la vie comme des amoureux….. la la  la la la la la la « .

Mamzelle Namous