Pourquoi sommes-nous si durs avec nous-mêmes? 
Je me faisais cette réflexion ce matin en lisant un traité de philosophie face au soleil naissant.
Non. Je me faisais cette réflexion ce matin ( à 11h) en lisant sur Facebook le statut d’une amie qui moquait gentiment les gens qui jeûnaient pendant Achoura ( fête religieuse où l’on a coutume de jeûner un jour ou deux. Pour plus d’informations, voir sites spécialisés, c’est pas que je veux partager l’information, c’est que j’en sais vraiment pas plus). 
Et elle n’était pas la seule à faire ça. D’autres le font de façon plus sérieuse et virulente. J’ai remarqué que, par exemple, à chaque veille de ramadan, ou d’autres occasions religieuses, beaucoup de personnes  critiquent les gens qui jeûnent en les prenant pour des cons qui ne font ça que par hypocrisie,  pour gagner des bons points et se faire pardonner leurs erreurs par le bon Dieu tout puissant là-haut dans le ciel. S’en suivent alors des débats stériles avec des personnes qui se sentent agressées par de telles opinions, et chaque camp reproche à l’autre son manque d’ouverture d’esprit. Ambiance! 
 
Ces moqueries ou critiques contre le jeûne sont inoffensives, elles sont même parfois rigolotes, mais elles sont quand même très récurrentes. Alors oui, notre société est remplie de moralisateurs religieux, de prescripteurs à deux sous,  et parfois on a envie de leur renvoyer la balle. Mais franchement, hors du ramadan, personne ne vous emmerde si vous ne jeûnez pas. Pour Achoura, c’est juste une vague tradition. Et quand bien même de plus en plus de gens ont tendance à le faire, qu’est-ce qu’on s’en fout, si ça leur fait du bien. 
 
Un truc qui me gêne aussi  pendant le ramadan, c’est les gens qui écrivent ou disent «  bon ramadan à ceux qui le font pour de bonnes raisons ».  Alors qu’avant on se contentait juste de juger les gens, voilà que maintenant on monte d’un cran et on se fait carrément juges de l’intention. 
 
Mais merde, peu importent les raisons qui  poussent à faire quelque chose. Qu’elles soient profondément pieuses, ludiques, traditionnelles, familiales, pour le ventre plat,  par superstition, pour dormir la journée sans culpabiliser. Tant qu’on emmerde personne….
 
Ce genre de critiques est souvent en réaction aux «  religieux » qui crient sur les toits ce qu’ils font, ce qu’il faut faire, qui ponctuent leurs phrases d’Allah ceci, Allah cela. Qui rentrent chez vous en vous demandent où est l’ kebla ( direction de la Mecque) pour qu’ils puissent prier, et qui vous regardent comme si vous étiez la dernière merde sur terre quand vous répondez « bah je sais pas, t’as pas l’appli boussole sur ton samsung galaxy S18? »
 
Alors oui ceux-là sont énervants. Et ils méritent sûrement qu’on se moque un peu d’eux parfois. Mais  je crois ( en tout cas j’espère), qu’ils ne représentent  pas totalement la culture algérienne. Qui est AUSSI  une culture d’humour, d’auto-dérision, d’arrangements avec soi-même, faites de : 
« bon ok je jeûne si le maghreb ( heure où l’on peut enfin manger) est pas trop tard , mais juste un jour.
-Mais non il faut faire deux jours de suite, pour le distinguer du jeûne des juifs.
-C’est pas grave, je serai juive cette semaine. »
 Pendant le ramadan:
« Je jeûne pas aujourd’hui, je voyage.
-Où?
– c’est un voyage intérieur. En méditation ».
«  J’ai un problème hormonal:mes règles durent 15 Jours, mais juste pendant le ramadan ». 

 « J’ai continué à manger ma tartine après l’fajr ( heure du matin où faut s’arrêter), je voulais pas gaspiller ».

 

«  J’aimerais tomber enceinte cette année, juste pour pas le faire. Mais merde j suis même pas mariée. ça craint quand même? »
 
J’ai entendu mille fois ce genre de choses et jamais il me viendrait à l’esprit de répondre «  ben si tu veux pas, ne le fais pas, personne te force », ou de penser que les intentions des gens ne sont pas nobles ou authentiques. Un, parce que j’emploie moi-même ces phrases. Et deux, parce qu’on est pas obligés d’être toujours complètement cohérents et sérieux. C’est déjà assez difficile de savoir ce que l’on est, ce que l’on veut, le pourquoi du comment de ce qu’on fait, si en plus les autres s’en mêlent méchamment…on est pas sortis du caca. 
Alors soyez gentils avec vous-mêmes, et pas trop durs avec les autres, ça facilite la digestion, la circulation, les rapports sociaux, buccaux, humains, transnationaux. Ça change la vie quoi, c’est le soleil naissant qui m’a dit ça ce matin. 

 

Namasté. 
Joyeuses Achourettes.