César et Rosalie

 

Aujourd’hui, cela fait deux mois que mon amie Nesrine est morte. J’ai encore besoin de parler d’elle, et surtout,  que ma vie continue à tourner autour d’elle.  Ceci dit, j’ai pas envie de remuer de la tristesse,  mais plutôt de raconter une anecdote. 

 

 

C’était il y a quelques années. Il faisait beau et bleu dans le ciel. L’herbe était verte, le soleil jaune nous illuminait l’opale de nos yeux, et …. merde qu’est ce que je raconte !

 

 

C’était y a quelques années, on était en train de déjeuner, Nesrine, notre amie Kaouther et moi sur la terrasse du  Cottage à Hydra (ne jamais aller là bas si vous êtes pressés).

 

 

On parlait, comme d’hab,  de nos histoires sentimentales foireuses teintées de vide, et à la table à côté il y avait deux types, visiblement algériens, qui parlaient en anglais. On se moquait de leur accent zaama américain.

Je sais plus comment, mais ils se sont immiscés dans notre conversation et l’un d’eux nous a dit «J’habitais à New York, j’ai beaucoup voyagé, et où qu’on soit,  les discussions des filles se ressemblent. Partout, on se croit dans sex & the city» .
Frimeur.

 

 

Ca nous a fait sourire, sauf qu’on lui a fait remarquer, qu’ici, en ce moment, pour nous trois en tout cas, c’était plutôt « No sex and no city».
Rapport au vide en amour, et à l’absence de vie urbaine.

 

 

Quelques blas blas, et hahaha plus tard, on est sorties. Nesrine, plus sociable et enjouée que nous, a un peu plus accroché avec eux, mais on l’a sommé de pas laisser son numéro.

 

 

Quelques semaines ou mois plus tard, toujours à Hydra, je suis en train d’attendre mon tour dans une sandwicherie .
Je vois un mec dont le visage m’est familier, mais j’arrive pas à le situer. Il me regarde, et me dit «On s’est déjà vus, non?……. Ah c’est vous no sex and no city!»
Oui, oui, c’est moi….Merci.
«Comment va votre copine?» 

Je l’ai recroisé à quelques reprises dans le quartier, on échange deux ou trois mots; et à chaque fois c’était rigolo de se remémorer cette anecdote avec mes deux amies.
Surtout avec Nesrine, avec qui je déjeunais plus régulièrement.

 

 

Maintenant, quand je suis dans le coin, vers midi, j’ai peur de recroiser ce type. Qu’il me lance, gaiement, «hey no sex and no city!». Que ça me ramène à tant d’histoires partagées avec elle. Les espoirs des débuts de rencontres, les recherches d’un endroit où aller, les problèmes de transport, finir toujours aux mêmes endroits, la peur de finir seule, l’optimisme alterné.

 

 


A sa mort, je regrettais qu’elle n’ait pas connu, dernièrement, une histoire d’amour à la hauteur de ce qu’elle voulait.

 

 

Puis j’y ai repensé, et ce n’était pas totalement vrai. Pas du tout même. Elle avait un amoureux, un vrai, un Mister Big, qui était avec elle jusqu’au bout, et cette vraie présence lui a redonné de l’espoir et la foi en l’amour (c’est une phrase banale, mais ça ne l’était pas pour elle).

 

Elle a donc vécu ses dernières semaines avec la possibilité d’une très belle histoire. Et la possibilité d’une histoire, c’est déjà une grande histoire.
(Oh la phrase fleur bleue, même pas digne de carrie bradshaw).

 

 

Tiens, j’en profite aussi pour vous dire que certaines nouvelles écrites par Nesrine seront publiées très très prochainement, j’en reparlerai sûrement. 

Comme quoi, ses histoires, toutes ses histoires, lui survivront, et ça, c’est palace! 

 

 

Mamzelle Namous