V. Lemercier Tumblr

 

 

Pour la beauté du geste, dans une cour intérieure je vis, et d’en haut je vois. C’est une jolie cour, pas la plus belle, pas la plus arrosée. Certains jours, des poubelles traînent une heure ou deux, mais elle a quelque chose de l’ordre de la majestuosité. Enfin, c’est ce que je vois certains matins.

Les jolis matins d’octobre.

 

Ils ont eu ma peau ces jolis matins. Ils m’ont porté tellement haut en moi. Puis quand octobre se finit, c’est le gris de la ville qui abrite la cour.

Ma cour, ma si belle cour.

 

Il faut bien lever les yeux pour voir le ciel. Faut pas avoir peur d’avoir mal au cou.

 

C’est l’immeuble qui est « c’est le deuxième, à gauche ». Y a un ange dessiné à côté, tu peux pas le rater.

La première fois, j’ai attendu l’ange avec impatience, j’étais heureuse comme indication.

Et puis, l’ange est tout petit et pas très joli. J’ai fait « bof ».

 

Mais j’ai poussé la porte, et là j’avais plus le choix, fallait que j’habite là.

 

 

Avant de signer le contrat, j’avais appelé ma mère, pour qu’à distance, elle valide. Elle a posé des questions, l’étage, la vue, les fenêtres, les espaces de rangement, les factures, les transports.

Et la sécurité.

 

Y avait un digicode. Et l’ange surtout.

Il est devenu beau avec les années.

 

Alors on a signé. Le proprio, quand je lui avais donné tous les papiers de garantie et tout, il m’a dit  » non non je prends pas tout ça moi. T’es clean, je serai clean ».

 

Je suis restée clean, sauf pour les traces de chaussures sur les murs certains après-midi, et les deux mois que j’ai payé en retard. J’avais eu des problèmes particuliers, mais il avait été doux comme un agneau, et comprenait ma situation.

 

L’ange venait me rendre visite parfois, et je m’endormais mal mais je me réveillais tellement bien.

J’essayais de me souvenir si j’avais envoyé des messages la veille, si j’avais dit des choses. Les choses.

 

Je sortais pas tôt de la maison, rapport à mes mauvaises nuits. Mais j’entendais, à 6h30, les voisins s’affairaient. La chasse, la douche, la radio, le café, les fringues bien préparées la veille. Le  » je cours, je suis en retard  » à 7h30. Cette routine angoissante et ce courage qu’il m’arrivait d’envier.

 

En une vie, je n’ai du préparer mes affaires la veille que trois fois. Quand on a un entretien à 9h et que voilà, on ne peut vraiment pas être en retard ou mal habillé.

Alors ces gens, qui cinq jours sur sept, font tout pour construire et réussir, j’envie parfois.

Et j’étouffe à d’autres fois.

 

 

 

 

Mamzelle Namous

 

(à d’autres fois!)