Quantcast

Archive du mois : décembre 2010

Number yey

Premier article écrit directement sur le blog, Youhou ! Youpi ! Il y a quelque chose de nouveau  dans ma vie. Pour marquer le coup, mes articles seront titrés (ou pas).

En revanche, je vais devoir me censurer, parce qu’une chose est sure, mes patrons lisent mes mots. Les flics aussi. Beaucoup de choses ont changé cette semaine.
D’abord, le comportement des flics à mon égard. Ils sont très sympas et ne m’arrêtent plus.
Pourtant mon taco est tellement défaillant que je vais devoir m’en séparer. La lampe s’allume automatiquement le jour, mais jamais la nuit. Et alors qu’avant on m’arrêtait à chaque barrage, depuis quelques jours, c’est signe de main et sourire et laissez passer.
Soit mon blog est dans les favoris des fichiers de police, soit mon doux sourire enjoliveur fait enfin son effet. On sait pas, on saura jamais.
Ensuite, certaines choses ont changé sur mon lieu de travail. Je travaille. Aujourd’hui, par exemple j’ai même pas pu faire une sieste. Trop dure ma vie. J’ai même pas pu prendre une pause déjeuner de 2H30 et boire un thé en discutaillant avec ma collègue de bureau.
Aujourd’hui, j’ai écrit des lettres, mon téléphone a sonné, j’ai utilisé un parapheur for the very first time, j’ai marché dans les couloirs dossiers à la main, j’ai couru dans les couloirs.
J’étais pas spécialement pressée, je voulais juste faire comme dans les films.
Aujourd’hui, je suis tombée en courant. La femme de ménage m’a vu. Elle me méprise encore plus qu’avant. Je sais pas pourquoi elle m’aime pas. Je sais pas, on saura jamais. Enfin ça remonte peut- être au jour où je ne lui ai pas dis bonjour parce que j’avais oublié comme on disait ça en arabe.
Ca va, je déconne, bien sûr que je sais le dire. Je  suis d’ici quand même. Enfin je dis ça, mais mon identité est sans cesse remise en cause par mes compatriotes.
Les algériens sont hyper méga attachés à la ville où tes parents sont nés. Pourquoi ? Je sais pas, je comprendrai jamais. Si ta famille vient pas de la Casbah, d’une grande famille de Tlemcen ou d’une grande famille constantinoise, tu viens de la plèbe. Malheureusement pour moi, je fais partie de cette dernière catégorie. J’en avais pas conscience jusqu’au jour où j’ai commencé à bosser ici.
J’assiste souvent à des conversations entre deux mecs qui se disputent pour savoir lequel des deux a les origines algéroises les plus anciennes.
Moi je viens d’une ville qui s’est spécialisée dans les pizzas (ouais ouais chacun son truc), alors chaque midi, y a toujours quelqu’un (toujours le même gars en fait) pour me dire « Ben mina tu manges pas de pizza ?! »
«  Non blaireau ».
Et puis je sais pas si vous avez vu la Casbah dernièrement, mais ça donne pas envie d’être né là bas.
On s’en fout de où est né notre arrière grand-père, non ? A part quand t’as besoin d’un extrait de naissance, et là faut que tu remontes à ton ancêtre le singe, je vois pas l’intérêt.
Mais bon, les autres le voient alors on va pas chercher à comprendre.
Mais je dis stop au déterminisme socio-régional. YEAH !
Voilà, après une journée chargée, je rentre chez moi. Y a tellement d’embouteillages que j’ai le temps de faire ma ptite sieste. Je suis réveillée par le gyrophare d’une voiture VIP qui veut passer alors que c’est bouché. Mais elle veut passer quand même. Comme si elle pouvait pas se permettre d’être en retard, elle. On sait pas pourquoi. Comme si elle courait un danger de mort. On sait pas qui c’est dedans. Laissons faire, laissons passer.
Le soir même, malgré ma fatigue, je sors pour fêter l’anniversaire de ma petite sœur. Elle a choisi un nouveau resto italien. Malheureusement, le gérant nous dit que le chef n’est pas là parce que sa femme s’est faite avorter. Enfin c’est ce que j’ai cru entendre. Mais ça doit pas être ça. La bouffe est bonne quand même, y a une jolie table, on parle d’avortement et de pilule du lendemain. On est pour, on est cool, on est ouvert.
Quand on donne des exemples, on dit toujours « Je connais une fille qui… ».
On est cool mais y a des limites quand même. Stop au déterminisme religio-culturo-sexuel ? yey……
Mamzelle Namous

number five

Aujourd’hui,  on m’a demandé de faire des heures sup ( sta dire de rester jusqu’à 18h!). Je voulais mais j’ai pas pu.

J’ai une social life de ouf, et je peux pas me permettre de laisser ma vie professionelle empiéter sur ma vie privée. Ca se fait pas.

Donc lyoum, on va parler des relations privées, avoir un mec, avoir une copine en Algérie. En nous limitant à Alger, parce que les autres villes c’est même pas la peine d’en parler tellemement ça doit être la galère.

Je connais pas très bien, mais je sais que dans certaines villes, ils vivent comme si y avait un couvre feu à 21h…. alors pour la tournée des bars avec ton gars, c’est un peu foutu.

Enfin tournée des pizzeria je veux dire.

Bref, Alger. Y a plusieurs catégories de couple.

Les sous dev, sta dire la hijabia et son mec, main dans la main, on les trouve à riad el feth, à sidi fredj , dans les cinémas, dans les buissons, dans les voitures et un peu partout. Ils s’aiment et le montre ( un peu trop). Ils s’en foutent. La pudeur c’est pas dans leurs moeurs, mais alors là vraiment pas!

Les très jeunes branchés. Ceux là tu les vois à la sortie des lycées soit disant cool ( français, privés, francophones). La meuf de 16 ans ( mais rien à voir avec toi quand t’avais 16 ans)  trop belle trop bien dans sa peau et son mec BB Brunes. Il la plaque sans complexe contre un mur et l’embrasse 3ainani, et tout le monde s’en fout. Sauf toi qui passe par là et qui n’en revient pas.

Parce que toi t’as presque 30 ans, et marcher avec ton mec à Alger relève de l’exploit. T’as l’impression que tous les passants te dévisagent ( c’est pas une impression), que l’ami au frère de ton père va te voir et dire à ton père qu’il t’a vu avec un mec ( dans ta tête t’as encore les réflexes psychologiques de tes 13 ans).

Et drame, ton mec veut te prendre la main. Déjà t’es pas comme ça, ta main c’est ta main, et en plus, putain, tout le monde va vous voir. Ta mère qui est pas à Alger va passer par là quand même et te caler. Et te poser plein de questions. C’est qui ce mec? Il fait quoi? Il a des intentions sérieuses?

Alors pour toutes ces raisons, la voie publique t’évites.

Heureusement y a des cafés et restos. Malheureusement, c’est pas byzance.

Les couples y ont souvent l’air pitoyable. Et t’as trop peur de leur ressembler. D’être frappée du syndrôme de la nana qui commande une pizza mais qui la mange pas. Qui demande ensuite une crèpe au nutella et qui la regarde refroidir. Qui joue aux tortillas avec ses cheveux, qui regarde son mec comme si c’était un appolon, et qui rit à toutes ses conneries.

Le mec en question, le jour où il la sort, il sort lui même le grand jeu et finit son pot de gel  pour l’occasion. Il repasse sa chemise mais oublie de se doucher. Pour compenser, il vide son vaporisateur axe africa. C’est limite s’il asphyxie pas la ville. Mais comme la nana est desespérée et un peu conne, elle  lui  dit qu’il sent trop bon. Et il lui fait un sourire. C’est pas Email diamant hein. C’est plutot Email manque une dent. Pour la magie du blanc, il faudra repasser

Alors forcément,  t’as pas envie de te retrouver là dedans.  Ton mec non plus. Il règle le problème en te disant que c’est mieux de pas sortir. Tu lui proposes de venir chez toi quand tes parents sont pas là , et il te regarde comme si t’étais Robert Redford dans « Proposition Indécente ». Il sait à ce moment là qu’il tépousera pas.

Tu comprends à ce moment là que t’en veux pas de ce mec là.

Tu te retrouves donc dans la jungle des célibataires algérois. Et un beau jour tu rencontreras un type ( ou une nana) qui te prendra la main sans que ça te choque, qui t’embrassera à bab el oued sans que ça t’intimide, qui te fera oublier la nappe en carton d’un restaurant, qui t’emmenera dans son appart, qui te fera vivre une histoire d’amour dans une ville où t’y croyais plus. Tu la verras même blanche Alger. C’est pas ça la magie du blanc?

 

P.S: ceci n’est pas une fin nian nian, juste une note d’espoir en cette fin d’année. Mais si vous êtes une fille célibataire, faut pas trop y croire, tout le monde sait que tous les mecs bien sont pris ( et ce partout dans le monde). Si vous êtes un mec, faut y croire et faut cracher le cash ( et ce partout en Algérie).

Mamzelle Namous

number fouw!

Achoura c’est fini. Faut retourner au travail, faire démarrer sa voiture sans réveiller tout le voisinage. Bien s’habiller, mais pas trop quand même, sinon les gens ils vont parler de toi.

Faut écouter les gens parler. Et y a un sujet dont les gens ils parlent beaucoup, c’est leurs plans de réveillon. C’est pas comme si tu t’en foutais, il faut qu’ils en parlent les gens de où ils vont se torcher la gueule du 31 au 1er.

Ah non pardon les algériens ne boivent pas (trop) d’alcool. Enfin si, mais juste les voyous, et les filles de mauvais genre.

Nous autres gens de bonne famille, on boit du coca.

Bref, le réveillon, mes faux amis et autres bougres ne parlent que de ça  en ce moment.

Y a ceux qui veulent aller au sud mais c’est un peu cher quand même. Ceux qui vont en Tunisie mais qui ont peur d’y croiser leur voisin tellement tous les algériens vont en Tunisie. Ceux qui carrément veulent aller en Turquie parce qu’ils croient que ça y est c’est l’Union Européenne. Ceux qui auraient bien voulu aller au Maroc mais dommage que les frontières soient fermées, mais bon paraît qu’il a y a des gens qui passent quand même. T’as même entendu un mec qui veut aller à Miami, mais tu préfères croire que c’est des mytho tellement t’es jalouse d’avance.

Et puis y a ceux qui vont clubber dans nos magnifiques hôtels de la capitale.

Et y a ceux qui vont jouer au scrabble. Je ne fais pas partie de cette dernière catégorie, je suis une fille cool, même que je vais faire une fête chez moi (ceux qui connaissent l’adresse sont invités), et même que la tequila le coca coulera à flots.

J’aurai bien aimé aller dans le désert, galérer dans le bus avec mes potes, dormir sous une tente, apercevoir Lawrence d’Arabie un soir où la vodka la chicha m’ait trop monté à la tête.

Mais je peux pas, parce que je travaille. Que j’ai pas de congé payé, et que de toute façon de je suis pas payée tout court. Et que de toute façon c’est pas comme si je travaillais vraiment.

En 15 jours, j’ai eu UN truc à faire, et en arabe s’il vous plait !

En venant travailler à Alger, je pensais pas que l’arabe serait un problème, parce que franchement qui parle arabe ? Bon ok, certains d’entre vous. Mais pas tous !

Je vous connais gens du niveau faible !

 

Quand tu bosses en France, tu peux mythoner sur ton niveau en arabe, dire que tu gères grave. Quand quelqu’un te demande si tu comprends le journal télé en arabe, tu peux répondre « Ben oui bien surrrrrrrrrr » ! Limite t’es offensée qu’on te pose la question.

Par contre si un jour, on te demande de faire la revue de presse des journaux du Moyen- Orient, t’es un peu dans la merde. Te reste plus qu’à aller déjeuner et plus jamais retourner au boulot, et déménager, et quitter le pays. Pourquoi vous croyez que je suis rentrée à Alger ?

Non je déconne, je suis rentrée parce que j’aime Alger et ses habitants (enfin surtout l’un d’entre eux).

Et la dernière fois, j’ai eu un bon exemple d’à quel point les gens de chez nous ils sont  aimables, et que tout le monde il est gentil.

C’était vendredi, et je voulais aller chez une copine. Heure de la prière, pas grand monde dans les rues, mon taco et moi on drive tranquille.

J’arrive aux alentours, toujours prière longue du vendredi, mosquée, rue bloquée, occupation de la voie publique par les fidèles. Mon taco et moi déjà engagés, plus possible d’avancer.

30 mecs te regardent bizarrement. Faut faire marche arrière, pensée pour Marine Le Pen, pensée pour mon moniteur d’auto école qui m’a pas trop appris la marche arrière.

La galère, la honte, j’y arrive pas, je manque d’écraser les mecs, de casser des rétroviseurs, de me prendre le mur, j’ai un torticolis, j’ai honte.

Quelques uns  me guident de l’extérieur (avanciii l’arrièèèrrre), mais ça m’aide pas, et j’ai honte de les gêner en cette heure de recueillement.

Et vlà qu’un mec me propose de prendre le volant pour m’aider à dégager. En deux temps trois mouvements c’est fait. J’ai même pas eu peur qu’il me kidnappe.

Et ça m’a rappelé toutes les fois (y en a pas eu tant que ça), où j’ai demandé à des inconnus de faire un créneau à ma place. Et qu’y a qu’ici que tu peux faire ça.

Et ça me rappelle que j’aime bien mon moniteur d’auto école et qu’il faudrait que je le rappelle.

Et ça me rappelle que moi aussi j’emmerde Marine Le Pen.

 

Mamzelle Namous

number fouw

Achoura[1] ! Fiesta[2] ! Pas de travail ! Chekhchoukha[3] !

Après cette longue semaine, où j’ai glandé non stop, j’ai bien droit à un peu de repos.

Semaine haute en couleurs. L’évènement le plus important n’est pas le changement de direction, mais la nana qui menace de se suicider car elle en marre de pointer.

Non c’est pas moi. Moi je m’en fous, je suis cool, j’aime parapher avec mon spécimen.

J’aime que de gens s’inquiètent de ma présence.

J’aime être payée à ne rien faire. Ah mais non j’ai pas été payée. Ca se passe comme ça ici, quand tu bosses dans le public, faut misérer les premiers mois. Faut galérer, faut apprendre que la vie c’est dur.

Quand au bout de 8 mois, tu demandes si ta fiche de paie est arrivée, on te regarde comme si tu venais d’une autre planète, «  Mazaaaaaaaal m.elle Namous, mazaaaaal[4] » !

Quand je descends à la Banque vérifier quand même –eh oui l’espoir fait vivre- je suis immédiatement propulsée dans le passé.

On a aussi tous vu des films de 14h50 sur TF1 où l’action se déroule à New York, où Sarah Goldman cherche son frère qui a été déporté dans les camps nazis, et où elle se rend dans un bureau de retrouvailles des juifs. Vous voyez un peu l’ambiance ? Eh ben la banque en bas c’est ça.

Si vous voyez pas, révisez vos basiques.

Quand je demande si je peux voir si mon salaire a été viré, le type (pas juif, pas américain, pas grand beau brun qui m’emmènera à Aspen), comprends pas ce que je dis. Une minute d’explications en franlgérien plus tard, il me demande si j’ai un compte chez eux. Bah oui ducon, sinon je serai pas là à te demander ça.

Vas y que je te donne mon rib, vas y qu’il vérifie sur son ordi (le premier ordi avant J-C).

Et vas y que non y a rien, faut attendre. Ok, y a pas de problème, c’est pas comme si j’avais besoin d’argent.

C’est pas comme si la ville regorgeait de tentations shopping, des restos hype, de terrasses chauffées.

Le shopping je préfère pas en parler, c’est un sujet trop douloureux pour moi.

Les restos, bon… la nappe en carton ça a son charme aussi !

Les terrasses… . De toute façon, moi je dis que ça se fait pas de manger dehors alors qu’y a des gens qui crèvent la dalle.

Non mais j’exagère un peu, y a du bon shopping (les autres l’ont trouvé, pas moi), y a des restos où nappe satinée tu trouveras, y a des terrasses où amis tu retrouveras et où parfois lapin on te posera.

Attendre seule sur une terrasse à sidi yaya[5], c’est quelque chose. Etre entourée de connasses frangées slimées blondassés analphabétisées qui sucent leurs pailles du haut de leurs 18 ans, matées par des vieux calvitiés sous-directeurs du directeur adjoint, qui de leurs doigts saucissonnés n’arrivent pas à tenir correctement une petite tasse de café.

Et toi seule au milieu, brunée, jamais bien  coiffée, à te demander ce que tu fais là,  à regarder l’heure, à supplier ton téléphone de vibrer, à attendre quelqu’un qui ne viendra pas. Après 30 minutes je me réfugie chez un marchand de DVD et achète un Hitchcock. Faut un truc grandiose pour me faire oublier mon calvaire. Dieu merci, Grace Kelly est à la hauteur de mon mal.

Je me dis qu’un jour moi aussi j’aurai la grâce et la classe. Et même pas besoin de fric pour ça.

 

Mamzelle Namous


[1] Jour ferié
[2] Vous comprenez pas le spanish ?
[3] Met traditionnel raffiné, comme son nom l’indique si bien
[4] Attends ma vieille

[5] Quartier branchouille merdouille

Number thwee

Ce matin, rien, nada, j’ai pas pu me lever. C’était l’une de ces nuits où tes parents ont regardé la télé assez tard, et où le bruit du téléfilm de 23h t’a hanté.

Vivre en Algérie c’est (re)vivre avec ses parents.
Certes, avoir un jus tous les matins, un vrai repas tous les soirs (ou presque), ne pas avoir à jeter la vaisselle parce qu’elle s’est trop accumulée et que tu vas jamais y arriver, gratter du fric quand t’en a plus, c’est bien.
Mais y a des choses moins bien. Je me suis par exemple toujours demandée pourquoi quand ma mère s’énerve pour une raison x ou y, ça finit toujours par le thème du ménage !
Pourquoi que t’as pas fait ton lit, pourquoi ton armoire ressemble à une fin de journée de soldes chez Zara, pourquoi tu penses jamais à faire du repassage (euh…have we met ?).
Ok, à ce stade de l’article, tout le monde va croire que mademoiselle Namous est un mec.
Mais non, je suis bien une fille, qui repasse ses fringues en mode lastminute.com et qui plonge littéralement dans sa penderie pour sortir un truc mettable.
Mais le sujet n’est pas là, le sujet c’est les parents. Pourquoi ils nous font chier matin et soir et pourquoi ils s’étonnent après qu’on se comporte comme des assistés.
Quand je vivais outre-méditerranée, et à partir du jour où j’ai eu la vingtaine, ma mère s’est mise à se comporter comme mon mac. Elle a même voulu que j’accepte l’invitation à diner du caissier sénégalais de mon supermarché (euh… have we met ?).
Elle voulait à tout prix me caser, et me donnait des conseils pour choper du mec et même voler du mec.
Croyez moi mes amis ça a marché ! Non je déconne, j’ai volé personne, il est venu tout seul.
J’insiste c’est pas pareil !
Maintenant que je vis sous son toit (celui de ma mère, pas de mon mec), les cibles pour choper ont changé. T’as bientôt 30 ans alors c’est fini les caissiers et les loosers en tout genre, faut penser aux petits enfants merde !
Et faut viser la grand-mère paternelle (vous me suivez ?) donc la mère de ton futur mari !
C’est elle qu’il faut pécho en premier. Et tu la trouves où ? Dans les mariages pardi !
Quiconque est déjà allé à un mariage algérien a voulu mourir  (mais non j’exagère pas). Les yeux rivés sur toi quand tu traverses la salle, tes amies que tu reconnais pas parce que ce jour là les stocks de fond de teint d’Alger ont été épuisés, les traces de rouge sur ta joue quand t’as tapé la bise à madame Benabdelmachin, la musique ( infâme ) qui t’assourdit, la conversation que t’as pas pu avoir parce que maintenant t’es sourde, les gens qui te traînent pour aller bouger du popotin devant ton arrière grand-père ( sérieusement faut arrêter de vouloir forcer les autres à danser), les mini rikiki pizzounettes au fromagou que tu sais pas où recracher, le coca même pas light trop chaud sur la table.
Tout ça pour quoi ? Pour célébrer avec joie et émotion l’union de deux personnes que t’apprécies ? Dans tes rêves ma fille !
Le marié, tu le connais pas, c’est juste le fils d’une connaissance de ton père.
La mariée, même si tu la connaissais, tu la reconnais pas. Tu voudrais pourtant aller la voir et lui conseiller d’enlever le casque que le coiffeur a oublié sur sa tête. Ah non c’est ta coiffure ? Ah ok….. Et les trucs qui brillent sur tes pores, c’est parce que t’as 13 ans et des problèmes de sébum ? Ah c’est fait exprès pour faire joli, oui bien sur…. Mabrouk Mabrouk !
Et en réponse, la phrase qu’une fille entend 1000 fois en une heure «  la3kouba lik nchallah »
(Nota bene : traduction pour les français. Un jour, peut-être toi aussi ma pauvre fille tu te marieras, mais avec la dégaine que t’as, n’y crois pas trop).
Bon, dans tout ça, ta mère cherche ta belle-mère. Bingo y en a une, son mari il est retraité mais c’était quelqu’un avant, elle a un fils qui vit à Paris (Bariz wechbik !). Et alléluia elle complimente ta mère sur ses filles (moi et ma petite sœur). Bien qu’elle n’ait pas trop vu nos gueules, vu qu’on a passé la soirée à textoter nos loosers de mecs.
La sentence se fait pas attendre, deux jours plus tard, ma mère va boire un café et des gâteaux en pâte d’amande chez la belle-mère en rêve, et elle s’étonne que tu préfères rester dans ton lit à mater Mad men plutôt que d’y aller.
Le jour où Don Draper sera algérien, je commencerai à rêver de chignons chez Omarrrr, le coiffeur des starrrrrrs. En attendant, chère maman, have we met ?
Mamzelle Namous.

Number two

Cette semaine, m’en fous de tout, je mets des pantalons et même pas de faux cils.

Je prends ma voiture qui est un taco et qui s’arête toute seule au milieu de la route. Les sous-dev me klaxonnent, les branchés me méprisent. Les flics ont pitié de moi, moi aussi j’ai pitié de moi.

Quand mon taco reprend l’âme, une deux chevaux m’applaudit.

Je suis pauvre, donc dans ma bagnole pas de lecteur CD et encore moins de branchement mp3 (c’est quoi ce truc d’abord ?), alors je suis condamnée à écouter mon souffle et la radio.

Quiconque a déjà écouté la radio algérienne a senti quelque chose mourir en lui. Les nanas y ont des voix stridentes et rigolent entre elles, toi tu sais pas pourquoi. Les auditeurs qui appellent sont pas des gens comme vous et moi. Visez plutôt : à un jeu genre question pour un champion (genre hein), la question est «  quel révolutionnaire français du 18ème siècle a bla bla bli bla bla bla ? » Un mec appelle et crache trop content «  Che Guevara ! ».

Là j’ai switché off.

Faut pas s’étonner qu’il y ait autant d’accidents de la route après.

Quand mes tétons et moi on se pointe au boulot, le petit vieux, qu’est mon copain maintenant, m’invite à des déjeuners. C’est sympa de sa part, faut juste qu’il s’habitue à pas m’y voir.

Sinon, les histoires continuent. Le bougre a une bougresse, ensemble ils friment. Ils friment de là où ils habitent, de là où ils vont manger (le bougre a gagné avec une entrecôte à 3500 dinars, ouais ouais ouais rien que ça) .Ensemble ils disent des phrases comme «  Tout le monde dit ça » «  Je sais » «  Moi j’ai un cousin » « Ma cousine » «  Moi je connais des gens au Ministère qui savent ».

L’aprèm en rentrant je m’arête pas chez le marchand de DVD parce que le flic m’a a l’œil.

J’arrive trop tôt à la maison et je trouve ma mère au lit avec le jardinier. C’est une blague, j’habite en Algérie, les mères font pas ça. Je trouve ma mère avec les cheveux plein d’huile parce qu’elle avait mal au crâne et que la femme de ménage lui a dit que c’était efficace l’huile. Hein? Ouais.

 

C’est la fête, je sors avec mon grand frère et ses potes. Resto mexicain d’Alger (le seul), bouffe libanaise, chanteur français, public en délire. Tout ça au même endroit. Hein? Ouais.

 

Mamzelle Namous

 

 

« Jeune vie algéroise »

Le matin tu te lèves, tu choisis tes vêtements. Faut pas que la jupe soit trop courte, sinon tes collègues vont la raccourcir du regard. Faut pas que tes bas soient trop fins, parce que t’as pas pu aller chez l’esthéticienne. Elle avait trop de monde pour te prendre, toutes ces filles voilées que tu vois dans la rue prennent soin de leur intérieur.

Tu prends ta voiture, tu roules doucement parce que les flics t’ont à l’œil. Un chinois te klaxonne pour aller plus vite, ils s’y mettent eux aussi.

Un flic t’arête, tu sais pas pourquoi. T’inquiète pas, il trouvera pourquoi.

Te voila repartie avec supplications et sanglots.

T’arrives au travail, tu pointes. Pas tes tétons, ta présence. Badgeuse plus empreinte digitale, rien que ça.

Tu marches tranquille dans le couloir quand un petit vieux t’aborde. Le voilà qui connaît tes dossiers et le voila qui veut travailler avec toi. Travailler en groupe.

Parce qu’en Algérie, on ne travaille pas assez en groupe qu’il te dit. Tu dis oui, tu parles bien, et ensuite tu le critiques avec tes jeunes et beaux collègues. Enfin beaux, je dis ça parce que je suis gentille et pas trop regardante par certains matins.

Après 3 heures à mailer, à poster, à commérer, à travailler un peu quand même, à poser des questions, à livrer des sourires, à remonter tes bas, c’est l’heure de déjeuner.

T’as de la chance, t’as le choix.

Tu vas dans un resto (fast food avec des tables et des fourchettes) avec tes collègues que tu trouve moches. Il est midi, t’as ouvert les yeux, t’as faim, t’es fatiguée.

Les vlà qui parlent politique, les vlà qui dénoncent, qu’avant c’était mieux, que c’est voulu, qu’on nous ment. Qu’on a du pétrole, mais qu’on fait rien avec. Que même le Maroc il est mieux que nous. Là ton sourcil se soulève, et le bougre il a vu ton geste.

Le vlà qui a pas avalé son bout de pizza crevette et qui te sort «  Non mais t’y es allée au Maroc récemment ? » « T’as vu comment ça brille là bas ? »

Non, j’ai pas vu le Maroc mais le bouffon m’a pas convaincu.

Le bouffon m’énerve. Le bouffon me dégoute.

Tu manges, tu les écoutes, tu souris de temps en temps, tu hoches la tête, t’en places une parce que t’es un peu hypocrite. Mais t’es plus vraiment là, t’es à la campagne, t’es dans ton lit, tu mates une série, t’es en train de mourir de rire avec ta petite sœur. T’es ailleurs.

L’aprèm dans ton boulot, t’es encore plus loin qu’ailleurs, tu dors.

17h , ruée vers l’or. Celui qui reste une minute de plus c’est celui qui fayote.

Tu rentres, tu sais même plus quoi répondre quand on te demande comment s’est passé ta journée.

Tu regardes même plus la télé parce que sérieusement y a quoi à la télé ?

Tu regardes un dvd que t’a acheté à 150 da, que le vendeur il a pas compris pourquoi tu aimais les films français.

Après 1h25 de phrases d’auteurs, t’as comme une envie de prendre une voix rauque et de dire des choses intelligentes, douces et profondes.

Un jour tu les diras, mais il faudra repasser pour ça.

 

Mamzelle Namous