Alors ça y est, Ben Laden est mort. On y croit moyen à tout ça.
A force d’entendre nos grand-mères dirent que le 11septembre qui s’effondre c’est les américains eux-mêmes, que le froid en mai c’est eux aussi, que la boulangerie qui ferme c’est surement eux, on a fini par contracter le syndrome du réflexe de paranoïa automatique. Le RPA.
On a aimé voir les télés ressortir leurs plus beaux spécialistes de politique internationale. Le profil idéal étant celui du type de même pas 40 ans, trois voyages moyen-orientaux à son compteur, l’envie de parler avec des concepts compliqués, l’envie de plaire, et l’illusion d’illusionner.
On a aimé voir défiler les images de Ben Laden, les mêmes depuis 2001.
On a adoré dire que le terrorisme en Algérie ne lui était pas totalement étranger. Que les premières victimes c’étaient nous. Autrement appelé le SUV (syndrome universel de la victimisation).
Bon, avec une décennie de traumatisme, on le mérite bien ce SUV. Certains en abusent un peu. On a tous un ami qui habitait au 10ème étage d’un immeuble en plein centre ville et qui a failli se faire égorger, in extremis.
Ouais ouais ouais, et moi j’ai survécu à une bagarre avec un ours un jour en 1996.
On a rappelé qu’un jour, au milieu des années 1990, une femme (je sais plus son nom), a dit au monde que si les étrangers ne s’occupaient pas du problème algérien, le terrorisme ferait des ravages mondiaux.
On s’est souvenu, avec amertume, des moqueries qu’avait suscité le président Zeroual, quand il a demandé aux banques anglaises (ou autres) de bloquer les comptes des réseaux terroristes.
Fermons cette parenthèse de SUV.
Vous vous souvenez quand l’actrice Marion Cotillard a émit des doutes sur l’histoire du 11 septembre, et qu’Oh Mon Dieu, comment a-t-elle pu dire une chose aussi incongrue ? Eh bien en Algérie, c’est l’inverse, c’est croire le discours officiel qui vous apparente à un imbécile.
Les océans se renvoient la balle de la crédulité et de la paranoïa. C’est aussi ça le libre-échange.
Ce qui m’étonne toujours c’est la différence de point de vue entre les mers, et la peur de ne pas savoir nager.
Je disais l’autre jour à une grande amie que non ceux qui croient que Ben Laden est mort dans les conditions présentées ne sont pas forcément des idiots. Que depuis l’enfance, on est éduqués de façon à voir les choses d’un certain angle.
Qu’il faut accepter le déterminisme des autres et voir le sien.
Le dépasser est une autre étape.
Y en a qui appellent ça l’ethnocentrisme. En France on apprend à l’école, qu’aux Etats-Unis, l’Amérique est au centre des cartes du monde et ça fait rire les élèves. Les profs d’histoire enseignent que la guerre d’Algérie c’est loin derrière.
Le français grandit avec l’idée que les iraniens sont des arabes comme les autres, que les arabes sont antisémites, et que l’islam est une race à part.
A l’école algérienne, on étudie tellement l’histoire et la géo de notre pays que ça finit par être gerbifiant.
L’algérien est un francophone comme les autres.
Tant que nous grandirons dans un monde où l’éducation cherche plus à nous façonner qu’à nous grandir, ne nous étonnons pas de souffrir d’étranges syndromes.
Mamzelle Namous