Première réaction: Gao??
Maintenant on connaît une ville de plus au Mali, notre culture africaine s’étend avec les crises !
Deuxième réaction: Mise en route du mécanisme de patriotisme émotionnel. Quand il arrive quelque chose à l’un de vos compatriotes, n’importe où dans le monde, la complicité nationale fait battre les coeurs.
Troisième réaction : Aller chercher plus d’infos sur internet. Mais c’est jeudi soir et le réseau est tout pourri.
Quand j’arrive enfin à me connecter, il est minuit, les otages ont déjà dû être libérés.
Non, pas de bol.
Internet n’en dit pas vraiment plus mais on peut lire partout : » le consul et ses diplomates« , « le consul (avec son nom éventuellement) et ses collaborateurs« , » le chef de mission et six autres personnes« .
Eux, ceux sont juste les autres. Pas de fonction, pas de nom. Sur le même modèle que » les journalistes machin et machin, et leurs accompagnateurs locaux ont été enlevés à … « .
Apparemment, c’est l’un des gars du consulat qui a donné l’alerte. Il était allé faire des courses et, au retour, a vu ses collègues se faire enlever. Aller acheter du pain et du fromage peut vous sauver la vie, souvenez-vous en.
Quatrième réaction : Poser, dans une colère bêtement sincère, les questions lambda du citoyen un peu beauf qui croit avoir compris quelque chose aux relations internationales. Genre « non mais pourquoi on les a pas évacué dès que la khalouta makhlouta a éclaté au Mali???? »
Et trouver ses propres réponses de beauf » de toute façon la diplomatie algérienne ma bka fiha walou…. » (traduction: la diplomatie algérienne c’est finiiiii »)
Poser une autre question : » et l’ambassade à Bamako, on l’évacue ou on attend sagement que la khalouta ne devienne batata meglouba? ** «
Cinquième réaction: Ouvrir un journal le lendemain et lire que le ministère des affaires étrangères a mis en place une cellule de crise. J’adore ce genre de termes , cellule de crise, cellule anti-terroriste, cellule d’urgence.
Je visualise une grande salle grise, avec une table vitrée au milieu, des hommes en costard qui s’affairent autour, blackberry dans une main, téléphone satellitaire haute-définition dans l’autre. Des fax qui vont et viennent, des pigeons msn messenger, des sauvetages de vie à l’horizon, des phrases codées, des stratégies churchiliennes.
La cellule de crise a permis, au plus vite, l’évacuation des familles des otages algériens. J’imagine bien tout ce beau monde s’activer autour de ça, à coups de : » appelle air algérie!
« leurs lignes sont occupées »
« essaie l’agence de l’aéroport »
« je les ai eu, mais y a plus de place en classe éco! »
« khraaa, ils disent toujours ça, appelle aigle azur! »
» ils font pas d’escale à Gao, comment on fait? «
Criiiiiiiise! Heureusement, le sosie de Don Draper rapplique, il suggère un avion militaire, il a de la ma3rifa (connaissances pistonnantes) dans l’armée.
Problème réglé, crise résolue, l’Algérie respire.
Bon, paraît que ça ressemble pas du tout à ça la cellule de crise, que ça serait juste deux/trois fonctionnaires qui communiquent, à l’aide d’un téléphone fixe ( la loooose), avec d’autres gens. Pffff!
Sixième réaction : En parler avec les gens, l’air miné. Et dire des banalités sur l’instabilité en Afrique.
Septième réaction : Oublier cette histoire
Huitième réaction : Se faire une fausse joie grâce à une info dans la presse selon laquelle les otages auraient été libérés.
Mais lire tout de suite après que les autorités algériennes ne confirment pas cette libération. Et qu’AQMI revendique cet enlèvement.
Mouer de la bouche…
Neuvième réaction : Apprendre que les journalistes se sont gourés, les diplomates algériens sont toujours en otage.
Soupirer….
Dixième réaction : Ne pas repenser aux précédents enlèvements de diplomates par des groupes d’al qaida. Oublier le cynisme, la fatalité, la logique, et la raison qui a ses raisons.
Garder espoir……
Mamzelle Namous
* Capharnaüm de merde qui caracole
**Avant que le capharnaüm de la merde qui caracole ne cabriole encore plus