Chez les blogueurs, il y a ceux qui étalent leurs résolutions, ceux qui font le bilan, ceux qui disent « Au revoir 2011, bonne année à vous tous« .
Ici, on ne fait pas de choses comme ça. On ne se souhaite pas la bonne année car cette expression expire le premier janvier à une heure du matin, quand un type ivre d’ivresse vous crie » Bonne Annéééééééééééééé ».
Ouais gros, comme tu veux.
Après c’est bon, en plus ça ne veut rien dire » bonne année ».
Ici bas, on ne prend pas non plus de bonnes résolutions, on a arrêté de le faire il y a au moins cinq ans, quand on a compris que la détermination à réussir ses objectifs , c’était pour les autres. Que tout est aléatoire de toute façon, yekhi kelchi bel mektoub. ( C’est écrit dans les grands livres du grand seigneur).
Une fois, pour faire genre on est des rebelles, on a pris de mauvaises résolutions, mais même celles là on ne les a pas tenu.
Genre commencer à fumer.
Ou dire du mal des gens. Enfin encore plus que les années précédentes. Non parce que chez nous ( moi et tous les gens que je connais), le commérage et la médisance sont devenus des obligations constitutionnelles. Même les bébés parfois on les critique.
C’est vrai qu’il y en a des bien moches quand même.
Ici, on ne fait pas non plus de bilans de fin d’année. C’est con d’en faire, ça sert à rien et ça finit par vous déprimer. Vous passez votre réveillon à pleurnicher et à demander aux autres s’ils sont contents de l’année écoulée, vous trinquez sans conviction à des conneries sans lendemain, vous devenez le meilleur ami du bar, et finissez la soirée à hurler « bonne annéééééééé » à des inconnus que vous méprisez.
Le lendemain et le reste de l’année, vous aurez l’espoir de ne pas être inférieur à tous ceux que vous méprisez.
Ici, ce qu’on fait, c’est qu’on prend une personnalité publique et on essaie de lui ressembler. Ca s’appelle la résolution des gens qui n’ont pas de personnalité.
J’ai commencé ça les dernières semaines de 2011. Ca a débuté par une imitation de Carla Bruni. Je me suis rendue compte que ma voix « Carla » était beaucoup mieux que ma voix d’algérienne à l’accent agressif qui agresse tout ce qui bouge. Donc cette année, j’offre de la douceur à mes paroles.
Je me suis entraînée, je n’ai plus besoin de tordre les lèvres pour faire ma Carla. Je maîtrise désormais le parler de la poule sans faire la bouche de canard, je suis contente.
Mon mec, quand il m’a entendu, il m’a dit « wechbih rebek? » (qu’est ce que t’as?). En temps normal, je lui aurai répondu « wechbih jedek? » (qu’est ce que t’as toi?).
( Z’avez vu un peu comme on est romantiques).
Mais là je lui ai dit » C’est la douceur qui prend ma langue. Tu adorerais en faire autant, mon chéri ».
Un jour, je lui écrirai une chanson.
Ce qu’on fait aussi ici, c’est qu’on décide de se débarrasser de ce qui nous pollue, c’est à dire 99% des gens qu’on connaît. Car il y a beaucoup de venin dans nos rues. D’ailleurs à Alger, il est à la mode de dire » Oh tu sais, depuis quelques mois, je ne parle plus qu’à trois personnes seulement« .
Ca fait genre vous êtes différent de la masse, et fier de ne pas être une entité sociable.
Alors cette année, nous allons veiller tard et rester seuls, écrire des textes, chanter-faux, rêver au spleen d’Alger, se moquer des autres, et voir la vie en hlouw. (la vie en doux).
Quel joli mot que hlouw, bien plus hlouw à nos oreilles que de le dire en français, et encore un trop petit mot pour toute la volupté qu’il contient.
Allez, j’arrête de vous faire ma Carla.
Bonne annééééééééééééééééé!!!!!
Mamzelle Namous