Once upon a time,  j’attendais le coup de fil d’un mec.
Je fixais mon tel, je sursautais à chacune de ses vibrations, j’insultais les gens qui m’appelaient et qui n’étaient pas lui, et j’avais mal au ventre.
Au fil des jours, après notre premier rendez-vous, n’ayant aucune nouvelle de lui, n’osant pas faire le premier pas ( parce que bouhhh c’est la honte), je me laissais doucement mourir.
Adieu recourbe-cils et soin éclat, le maquillage n’avait plus de raison d’être. J’errais dans la vie en jean et cheveux gras, dans l’attente de voir son nom s’afficher sur mon tel.

Chaque matin, la super copine avec qui je partageais un bureau me demandait « alors il t’a appelé? », c’était l’obsession du moment et je racontais ça à chaque personne croisée.

Les spéculations allaient  bon train, des stratagèmes se montaient. Il fallait appeler en premier, attendre, envoyer un texto (on a essayé d’écrire un message cool et mignon. Trois heures et quatre filles plus tard, aucun résultat probant n’a permis l’envoi du texto), ne rien faire,  faire une filature devant chez lui, engager un détective privé, se poser mille et une questions.

 

Une éternité plus tard ( enfin une semaine dans le langage des gens équilibrés), alors que j’étais exsangue, mon téléphone connut une heureuse sonnerie.  Au début, je croyais que c’était ma mère qui me demandait d’acheter quinze baguettes de pain, je pris la machine avec lenteur.

Et là, je vis le doux et joli prénom du garçon tant attendu. Stupeur et tremblements. Disparition de la voix. Je sautille jusqu’à ma copine pour lui montrer le cadran qui contient son doux et joli prénom.

Elle me crie : REPONDS!!!!

Moi, voiceless, je lui fais signe que je ne peux pas. ( Je précise que j’avais au moins 25 ans lors des faits, ce qui correspond généralement à un état pré-adolescent chez les gens équilibrés).

La nana du bureau d’à côté a hurlé : « Attends la dernière sonnerie et réponds, sinon ça fait trop la fille qui n’a pas de vie.  »

C’est le cas non?

A la dernière sonnerie, je décroche. Je prends une voix suave et détachée. Je ne sais pas faire ça mais je me persuade que si. Deux filles me tiennent les genoux, et chuchotent « je me demande ce qu’il veut;  pourquoi il a mis autant de temps; tu crois qu’il va l’inviter à dîner;  comment elle va s’habiller… ».

 

Le garçon au joli prénom me dit qu’il va passer dans deux heures pour me voir. Je me suis regardée dans la glace, j’ai vu ma face….. J’ai dit que j’étais occupée.

Il a insisté.

Les deux filles m’ont donné des coups aux genoux,  dans le langage commun ça signifie « dis ouiiii« .

Je cède, ok,  à toute à l’heure, je raccroche.

Excitation et tremblements, mes copines font des calculs, j’ai deux heures pour être BOUMBASTIC VERY FANTASTIC .

Il faut aller chez la coiffeuse, je sors du boulot, je cours.  Tous les sièges sont pris, elle me dit de repasser. Je pleure que c’est urgent. « Ghir el kheir? » s’inquiète la coiffeuse. J’ai rendez-vous avec un garçon…. 

Elle regarde mes cheveux, évalue mon âge, mon degré de désespoir…… Et place un siège au milieu du salon pour me coiffer.

Je suis présentable, je respire de nouveau.De retour au bureau, mes copines m’ordonnent de mettre une tenue un peu plus sexy… On a toujours une robe ou une paire de talons d’urgence dans le bureau, parce qu’on ne sait jamais quels aléas la vie nous réserve.

Une des filles court acheter du mascara chez le mec qui vend des cosmétiques et du chocolat, et je me maquille.

Je suis prête, le garçon arrive et m’appelle. Mais au dernier moment je suis prise de de bouffées de chaleur et de stress.  Et si des frisottis se dressaient sur ma tête? Si je bafouille? Si je lance des postillons à tout va? Et si une moustache se dessinait sur mes lèvres? Une nana me propose un petit shot de vodka pour me calmer…… On a ça dans le bureau?

Ah oui ouf merci!  Non jamais de la vie, qui a ce genre de choses?!

Mes copines me crient que je suis belle, que le garçon ne se doutera jamais du joyeux et flippant ramdam qu’a provoqué son coup de fil.

 

La rencontre au eu lieu  et au final il ne correspondait pas  aux  souvenirs que je m’étais montée  durant toute la semaine.  Je me suis jurée de plus jamais  me prendre autant la tête pour un homme. Me suis trouvée jeune et con.Depuis cet épisode? Il y en a eu d’autres dans ce bureau.  Les placards sont encore remplis de collants de rechange, de joints et de kits make up d’urgence. Les mêmes filles tarées m’entourent,  on est toujours aussi cons, les jolis et moins jolis garçons vont et viennent dans nos histoires, c’est beaucoup d’énergie et de pathos, mais Dieu qu’on se marre !

 

 

Mamzelle Namous