Vous, de vos yeux mielleux, demandez à la jeune fille «  Et tu fais quoi dans la vie ? »

Je suis commerciale chez Mobilis.
«  Et ça te plait ? Ca va ? T’y fais quoi exactement ?»
Je détermine les grandes politiques communicationnelles et technologiques de l’Algérie. Voire de la région.
Bla bla bla, vlà vlà vlà, elle va entrer dans des détails chelou sur l’uniformisation des réseaux, va évoquer une zone MENA.
Vous serez tentés de demander ce que c’est, histoire de faire la conversation, mais allez vous abstenir, pour pas passer pour un con.
C’est bien.
Hochez la tête et paraissez impressionné. Cette fille vous sera très utile lorsque vous voudrez avoir des infos sur une abonnée Mobilis.
Ou choper une puce gratuite.
Ensuite, si vous ne trouvez rien de palpitant à raconter, demandez-lui ce qu’elle a fait comme études.
Quand elle vous répondra «  dert l’inc », de grâce, ne lui faites pas la liste de tous les gens que vous connaissez qu’on fait l’inc. C’est insupportable.
Banni le «  Aaaa  tu connais Mohamed ?  Celui qu’avait une clio grise. Hayel le mec hadak !  Je me rappelle plus de son nom de famille, mais il bosse chez  sonelgaz maintenant. Non tu vois pas de qui je parle ? » .
Elle vous posera certainement les mêmes questions, et là ne vous étendez pas. Rien de plus chiant qu’un type qui parle trop de son boulot.
Parce que franchement on s’en fout. Vos clients, votre patron, vos rapports de marketing, votre assiduité, le fait que vous soyez le meilleur dans le secteur (vous dites tous ça), vos horaires que vous ne comptez pas,  votre collègue Rachid qui n’en branle pas une depuis qu’il a été évincé du projet Process 10 OP (et c’est vous en réalité), les autres boites qui vous courent après tellement vous êtes bon,  ON S’EN FOUT.
Passons à autre chose.
Au fil des années, l’algérienne a traîné une réputation de matérialiste sans frontières.
C’est parfois très vrai.
C’est parfois, légèrement, surfait. Et du coup, certains hommes tombent dans le panneau et pensent pouvoir  impressionner la nana en lui parlant de leur acquisition du dernier écran plasma sony introuvable en Algérie.
C’est juste ridicule, n’étalez pas votre vraie ou prétendue richesse. Ca tue le sex-appeal.
Soyez soft, soyez grand, restez vague et mystérieux.
Puis, entre le dessert et le thé à la menthe, glissez le mot héritage dans une phrase.
Ses jolis yeux vont briller, la menthe va lui monter à la tête, jackpot elle pensera.
Dans votre poche elle sera.
Plus tard dans la soirée, vous aurez envie de l’embrasser. C’est obligé. Et elle aussi.
Le problème, en Algérie, c’est qu’au fil des décennies on a décidé que ça ne se faisait pas en plein dehors.
La plupart des endroits publics ne s’y prêtent pas.
Et la voiture, bon…………………
Un baiser en pleine rue, c’est tellement bien pourtant.
Mais nous ne sommes pas à New York, à l’angle de  la 74ème et la 110ème  (si comme moi vous ne connaissez pas New York, et  que vous ne comprenez rien aux rues et intersections dans les films).
Mais voilà, on n’a encore rien inventé de mieux qu’un ciel ouvert comme spectateur de votre premier baiser. Donc si vous n’avez pas la possibilité de lui faire visiter votre terrasse privée, embrassez-la en pleine rue.
Faut la surprendre la nana. Lui montrer qu’avec vous, la ville ne sera plus la même.
Lui donner des trucs à raconter à ses copines. La faire sortir de sa prudence.
Il se peut qu’elle se barre en courant, parce qu’elle a cru apercevoir le cousin de l’oncle de sa mère un peu plus loin.
Mais une fois chez elle, elle se dira «  waw génial ce mec ».
Le temps d’un baiser, oubliez les gens, la merde, la crasse, les flics, les minables, les voyeurs, la bienséance, la nuit noire.
Vous ne me croyez pas ? Essayez la prochaine fois.
You’ll thank us later…..




Mamzelle Namous