
hedi slimane
La nuit, comme beaucoup des gens, j’ai des rêves qui racontent l’impuissance et le blocage. Quelqu’un que les bras n’atteignent pas, une maison en virages, une mer dangereuse.
La journée au bureau, je visualise, je marche, j’entends.
Quand il est midi trente, que les couloirs sont vides, les traverser relève parfois de l’absurde. On se sent flotter, à la limite entre vaciller et s’envoler. Les pas sont du cinéma.
Je rejoins le bureau vide. Il y a le rêve de la fenêtre qui s’ouvre complètement. Mais ça n’existe pas dans les bureaux, elle ne s’ouvre que pour laisser un peu d’aération passer. Et encore, pas en été. Fait trop chaud, t’es folle, ferme tout de suite.
Y a la peur que les gens voient trop loin ou puissent le sentir, le trop bas.
Le vertige du saut, ou la phobie de l’impulsion, comme a dit l’autre.
Avant avant, je faisais ça. Je regardais par la fenêtre du douzième étage, y avait des garçons qui jouaient au ballon. Je m’amusais à deviner leur jeu interrompu par la chute d’un corps. Le cri, le boum, le sang.
Leur journée après ça.
Puis je pensais à la vie des mères après, et je chassais la pensée même de la pensée. On ne peut décidément pas leur faire ça. Pas plus que je n’en avais envie. Des pensées qui traînent simplement.
Quand l’après-midi reprend, les bureaux se remplissent. J’entends les gens avoisinants s’occuper, classer, taper, imprimer. Les talons qui marchent.
J’imagine les scènes de tous ces étages et bureaux comme dans certaines prises de vue. Vues de l’extérieur, toutes ces petites pièces en boîte contenant des vies mouvantes.
J’imagine moi, et je mets à marcher. J’entends la femme du bureau à côté chantonner. C’est désagréable au début, puis sa voix entre dans l’air.
Parfois, des bonnes femmes ( expression moche mais qui s’applique tellement bien à des moments) se mettent à hurler. Parce qu’on leur enlève 4000 dinars de leur salaire quand elles s’absentent deux jours lorsque leurs gosses ont la grippe souvent (les gosses, j’te jure…). Parce qu’elles ne peuvent pas prendre leur congé pile le jour où ça les arrange, alors que d’Autres le peuvent.
Parce que ceci, parce que cela, les femmes crient des mots affreux qui sortent de leurs trachées et s’insinuent en nous. C’est insupportable cette vague.
C’est jamais les hommes qui font des scandales. Un homme ça reste calme, raisonnable, ça va voir le senior manager et ça explique. Ca n’explose pas.
Quand je serai grande et que j’aurai des problèmes, je me dis que je ferai comme les bons hommes ( ça sonne bien ça), je ne laisserai pas tout mon sang exploser. Ca ne vaut pas la peine de se mettre à nu devant des gens qui n’en valent franchement pas la peine, dit souvent l’autre.
L’autre disait aussi que, dans certains coins, il ne fallait pas donner l’occasion de sa faiblesse, car les malveillants allaient la prendre et la garder contre toi.
Mais la nuit, parfois, comme des gens, je rêve qu’entre la maison sur la route et l’océan, il n’y a pas de murs. Que la demeure n’est que fenêtre sur danger.
Mais ça je ne le dis pas.
Azrar
le 30 août 2012 à 21 h 32 min« des rêves qui racontent l’impuissance et le blocage » ya latif, tu viens de décrire un sentiment national
Dodi
le 30 août 2012 à 21 h 32 minwow très touchant !!
Hayat TheAlgerianWay
le 30 août 2012 à 21 h 42 minJ ai l impression que les matins (ou soirs) algériens ne sont pas si lointains que ça que des matins parisiens … comme une saudade comme on dit au Brésil – une latence qui corrige les bruits haletants en rumeurs et les problèmes en solution …
Quand tu seras grande Mlle Namous – doh tekbir outennsa (excuse l accent) voilà ce que dirait ma mère –
Ci dessous un extrait de mon journal de l année dernière à la rentrée – 1000kms qui nous separent et pourtant ….
« Le matin haussmanien
De ma fenêtre.
Les murs blancs, comme lavés à la chaux, réverbèrent le soleil au zenith.
Le calme bourgeois bruit sans se faire connaitre
La communauté des avocats compile les heures avant la mort d’un dossier
Le calme studieux- à tout moment- pulvérisé par les soubresauts d’égos
On entend – alors – des rires qui claquent et défoncent les murs
Des talons de chaussures qui martèlent et bonifient le sol ancien
Des cafés excellents qui adhèrent l’oesophage
Et des cigarettes, même pas fumées, qui explosent en volutes depuis le 6ème étage
Des histoires de coeur embourbées dans la solitude ou le trop-plein du couple
Des pillules et des bouquets de fleurs
La vie à trente ans – célébrée ou subie.
Hayat
thealgerianway.blogspot.com
Mon nom
le 30 août 2012 à 21 h 51 minje ne vois vraiment pas de coherence dans ton texte mina, mais je suis toujours tes publications et prends du plaisir à les lire … j’aime bien aussi ton style un peu ironique. anyway bonne continuation
zigabotta
le 30 août 2012 à 23 h 09 min@Hayat: ton extrait ci dessus vrai bnawene …. lazeme en urgence ndire renvoi d’appel de JVA vers thealgerianway.blogspot.com
mchtakke ma3riffa
vent2sable
le 31 août 2012 à 5 h 15 minCiulà tu l’as écrit tellement vite que tu l’as même pas corrigé! Ma parole tu l’as fait juste pour étouffé l’incendie des commentaires du précédent ?
Non je blague !
Même tes états d’âme sont jolis ! bravo.
Votre nom
le 31 août 2012 à 11 h 28 minAwsome.
anissa
le 31 août 2012 à 13 h 37 minje n’ai jamais voulu imprimer mes pensées de la nuit, car dès les premières lueurs du jour, ces pensées semblent trop folles sous le soleil algérien.
Minouche
le 31 août 2012 à 15 h 04 minNamous semble à l’heure (l’heur?) des choix.
Reste, restera pas?
zidyabouzid
le 31 août 2012 à 15 h 22 minJ’aime, et ce depuis toujours, lire ton blog
Je souriais ce matin (mes matins italiens ne sont pas loin de ressembler aux tiens) à la lecture du clin d’oeil de TheAlgerianWay blog. Tout comme elle, Je tiens à te remercier (ainsi que dz-chick) pour la compagnie précieuse…c’est à chaque fois avec beaucoup d’émotion que je revis/revois mes plus beaux/folkloriques moments d’algerienne entre tes lignes
Zina
Minoucha
le 31 août 2012 à 15 h 35 min« Namous semble à l’heure (l’heur?) des choix. »
– Ouais, à l’heure des doutes mêmes..
Hayat TheAlgerianWay
le 31 août 2012 à 16 h 36 min@Mlle Namous- on dirait que tes lectrices ont bcp de points en commun …ça doit venir de ta sincérité :)
@ zigabotta – merci pour le compliment, cc’est très touchant
@ zidyabouzid – merci à toi – te l avrei potuto scrivere in italiano … dove abiti in Italia? Conosco benissimo la Toscana …
Explication de textes SVP......
le 31 août 2012 à 18 h 43 minune maison en virages
Les pas sont du cinéma
Y a la peur que les gens voient trop loin ou puissent le sentir, le trop bas
Mais la nuit, parfois, comme des gens, je rêve qu’entre la maison sur la route et l’océan, il n’y a pas de murs. Que la demeure n’est que fenêtre sur danger.
MilaEve
le 1 septembre 2012 à 9 h 08 minc’est beau, d’une grande sobriété, tout, même la photo
et ça fait du bien, ça me donne envie d’aller visiter avec plus de bienveillance mes rêves d’impuissance
Fantôme d'Alger
le 1 septembre 2012 à 13 h 58 minUn petit peu de ça Vent2sable! (Désolé Namouss)
Je le trouve toutefois plus intéressant. Je voudrais évoquer un autre sujet: Je sens en moi cette sensibilité maudite à la ville, les gens, la vie, l’air…maudite, car sensibilité consciente, merde! maudit est aussi le jour où je suis tombé amoureux de la littérature. Avant, en s’approchant de la plage, je sentais la mer, et je m’excitais avant de la voir; une fois arrivé, j’y plongeais avec fougue. C’était la conquête et la jubilation du bonheur. J’étais physique, Proustien!
Après la littérature, en s’approchant de la plage, je la sens…puis l’imagine, puis me dis, c’est beau une plage, comme ça, sans raison; c’est beau parce que ça l’a toujours été, et que tout le monde est d’accord là-dessus. Tiens aujourd’hui, je vais attendre de voir le coucher du soleil, c’est plus beau ça aussi, c’est même parfois romantique. Et voilà, que tout est abstrait pour moi, même s’il est là, à ma portée…le sable entre mes doigts…Foutue littérature!
Votre nom
le 1 septembre 2012 à 20 h 48 minL’effet brouillon, pensées éparses donne de la sincérité et transmet des émotions brutes j’aime beaucoup!
J’aime aussi ton aisance à changer de style!
ce texte contraste un peu avec la légèreté des articles précédents, c’est bon le renouveau
keep going!
des questions
le 3 septembre 2012 à 0 h 03 minpour moi la nuit c’est un moment vague un moment ou lorsque tu t’apprête a dormir des idées chamboulantes te viennent a la l »esprit des questions qui te creusent le crane sans que tu puisse y répondre
la nuit évoque en moi des questions qui pourrait changer le cours de ma vie tels que « pourquoi dieu m’a t il crée??? quel est le but de ma vie ma raison d »être ???? qu’ai je fais de ma vie jusque la ??? si je ferme les yeux maintenant ou est ce que je vais me réveiller est ce bien sur mon lit douillé ou est ce sous la terre ????pourquoi je cours après les choses matériels de cette vie alors que je sais très bien qu’elle ne durera pas que même si je réalisais mes rêves y’aura toujours quelques chose qui manque j’aurais toujours besoin d’autres choses……
quand est ce que sera ma fin??? merde pourquoi ces questions ne viennent que le soir alors que je suis super fatigué ,pourquoi ces idées ne me redressent elle pas sur le droit chemin ;que dieu nous a bien indiqué; tout ça pour des choses futiles de la vie
PS: une simple pensée que je voulais partager avec vous jeunes lecteurs de JVA et j’te souhaite une bonne continuation mina^^
lamnonyme
le 23 septembre 2012 à 8 h 05 minEuh… à Alger, des hommes qui n’explosent pas… Là je suis pas du tout d’accord. Et même dans le monde en général tiens. Certes certaines femmes crient etc. , mais ce n’est pas une donnée biologico-féminine, et puis elles subissent pas mal en silence, les femmes à Alger, alors oui parfois elles vont hurler pour des banalités. Mais c’est peut être pour faire autant de bruit que leurs hommes./
Jeune Vie Algéroise » Archive du site » Matin/Nuit
le 4 août 2015 à 3 h 29 min[…] de journées. On en parlait beaucoup, j’étais moi-même fascinée par cet imaginaire ici, ou ici (mais en mode kar3ajia-gossip girl que je suis […]